What are you doing here darling ?

Inspirer. Expirer. Inspirer. Expirer.
Pénélope ne cessait de se répéter cette phrase dans sa tête alors que sa cadence s'accélérait. Sous ses yeux, un paysage principalement verdoyant défilait. Le parc de l'Académie, vide, s'offrait à elle. Mais ce magnifique tableau, elle n'avait pas le temps de le contempler. Il fallait qu'elle trouve un endroit écarté, et vite.
La jeune fille avait planté là la conseillère d'orientation qui lui faisait visiter son nouvel établissement pour la rentrée, et avait couru en dehors du bâtiment. Elle avait dévalé une petite pente de verdure avant d'apercevoir un lac face à elle. Au fond de celui-ci, sur la rive opposée, elle avait aperçu un saule, touchant par endroit la surface lisse de l'étendue calme. Vite. Elle commençait à avoir des "nausées". L'endroit serait parfait.
La rouquine se mit à courir pour faire le tour du lac, sa chevelure dansant derrière elle au gré du vent et sa jupe bleue marine se soulevant légèrement. Son chemisier blanc commençait à s'échapper quand elle arriva enfin sous l'arbre. Elle lâcha son sac et tomba sur ses genoux. Le cri retenti à ce moment là. Puissant et aiguë. Elle n'avait pas pu ou su le contenir. Alors il était sortit. Ce son horrible. La raison de sa présence dans ce pays, dans cette même Académie. Elle détestait ce son, ce "don".
Vidée jusqu'à la dernière décibel, Pénélope s'adossa contre le saule, éreintée. Heureusement que l'université était vide et que personne ne sillonnait le parc. Ou cela aurait fait comme avec ses amis musiciens... En repensant à l'incident de cet été, la rousse mit sa tête dans ses mains. "Je suis un monstre" se disait-elle, "un horrible monstre". Elle n'avait pas voulu ça. Elle ne l'avait pas choisi. C'était arrivé à la fin de l'été, à peine une ou deux semaines de ça. Ça avait gâché ses vacances, gâché sa vie. Ce "don", elle le voyait une malédiction.
Inspirer. Expirer. Inspirer. Expirer.
La jeune fille essaya de retrouver son calme, lentement. La crise de panique qu'elle venait d'avoir était du à la réalité soudaine de son changement de vie. Elle ne voulait pas y croire, elle se pensait dans un cauchemar, elle pensait se réveiller bientôt. Mais la visite lui avait fait réaliser que tout ceci était bien la dure réalité.
Son regard fixait l'étendue d'eau et son visage était impassible quand elle entendit remuer à coté d'elle. Elle ne bougea pas. L'intrus allait sans doute partir et la laisser tranquille.
"Oups, je pensais que c’était libre"
Cette voix. Elle connaissait cette voix. Son rythme cardiaque s'accéléra et, comme poussée par la curiosité et l'espoir, elle se retourna. Ses yeux verts rencontrèrent des homologues noisettes. Une teinte douce et claire. Magnifiques. Son coeur fit un bond dans sa poitrine.
"Pénélope. Salut. Tu aurais pu me dire que tu avais un pouvoir quand même !"
La jeune fille leva un sourcil à l'entente du mot "pouvoir" et le rabaissa bien vite. Peut être fallait-il qu'il revoit sa notion du terme, parce qu'elle voyait plus ça comme une contrainte.
La rousse chassa bien vite cette pensée et fut envahie par la surprise et un immense bonheur.
"Hayden ! Qu'est-ce que tu fais là ?!?"
Revoir cette merveilleuse rencontre de Paris ici, c'était la lumière de son cauchemar. Il était là, devant elle, toujours aussi sexy, elle croyait rêver. Si c'en était un, elle n'était pas vraiment présentable... Présentable...
Pénélope écarquilla les yeux et pencha ceux-ci sur sa tenue. Elle ajusta à la hâte sa jupe qui manquait de dévoiler son sous-vêtement, reboutonna sa chemise qui en montrait beaucoup trop à son goût et tenta vainement de remettre en place sa chevelure sauvage et flamboyante. La jeune femme, plus ou moins satisfaite de sa remise en beauté express, replanta son regard dans ceux qui la faisaient fondre, un peu gênée. Elle esquissa un petit sourire mystérieux dont elle avait le secret avant de s'adresser au jeune homme une nouvelle fois.
"Je suis vraiment contente de te voir, Hayd'"